La mission BepiColombo
Lancé le 19 octobre 2018 par une fusée Ariane 5 depuis la base spatiale de Kourou, en Guyane Française, la sonde BepiColombo devrait mettre en orbite autour de la planète Mercure deux orbiteurs aux alentours du 5 décembre 2025. C’est une sonde massive de plus de 4 tonnes qui emporte deux modules qui seront mis en orbite autour de la plus petite planète du système solaire et aussi la plus proche de notre Soleil.
BepiColombo, la mission d’exploration de Mercure lancée par l’ESA (Europe) et la JAXA (Japon), a effectué ce 10 avril 2020 une manœuvre cruciale d’assistance gravitationnelle pour ajuster sa trajectoire. Les scientifiques de huit laboratoires français, qui ont contribué à la conception de six instruments embarqués à bord de BepiColombo, vont profiter de ce survol de la Terre pour étalonner et tester leurs instruments.
Lancée en octobre 2018, la mission BepiColombo est passée à seulement 12.700 kilomètres de la Terre (soit presque exactement la longueur du diamètre de notre planète) le 10 avril à environ 6h25 CEST (heure de Paris). Cette manœuvre, qui met à profit la gravité de la Terre, a donné de l’élan à BepiColombo et courbera sa trajectoire vers le centre du Système solaire.
BepiColombo se compose de deux orbiteurs scientifiques : l’orbiteur planétaire de Mercure (MPO ou « Bepi ») de l’ESA et l’orbiteur magnétosphérique de Mercure (MMO ou « Mio ») de la JAXA. Construit par l’ESA, le module de transfert vers Mercure (MTM) transporte les orbiteurs jusqu’à Mercure en combinant un système de propulsion hélioélectrique et plusieurs manœuvres d’assistance gravitationnelle, dont le survol de la Terre, imminent, deux survols de Vénus et six survols de Mercure avant les insertions en orbite de MPO et Mio.
C’est le CNES, l’Agence spatiale française, qui assure pour l’ensemble des partenaires nationaux la maîtrise d’ouvrage de la contribution française à BepiColombo. Celle-ci est particulièrement importante sur l’orbiteur Mio de la JAXA, avec une participation à la réalisation de cinq instruments, trois dans l’ensemble instrumental de mesure d’ondes plasma, et deux dans celui de mesure des particules chargées.
Juste après son survol de la Terre, la sonde BepiColombo a effectué une série de 121 photos haute-résolution de la Terre tout en s’éloignant d’elle pour toujours : objectif Mercure. Ces photos ont été regroupées dans un “time-lapse” qui enchaîne des photos séparées l’une de l’autre de 10 minutes environ. La première a été prise le 10 avril 2020 à 17h13. T.U. (temps universel) et la dernière à 0h30 T.U. le 11 avril. Ces photos sont magnifiques et donnent l’impression que la Terre recule au loin, alors que c’est le contraire : c’est bien BepiColombo qui s’éloigne de le Terre.
Ce n’est pas une vidéo, qui serait filmée en continu, mais bien un time-lapse qui est une succession d’images fixes qui donnel’impression d’un mouvement dans le temps. Le croissant qu’on voit à gauche de l’image n’est pas la Lune mais bien notre Terre, éclairée de côté par le Soleil.
La sonde BepiColombo en phase de tests avant son lancement
Entre son lancement et sa destination finale autour de Mercure, BepiColombo a donc déjà bénéficié d’une assistance gravitationnelle de la Terre et elle utilisera deux attractions gravitationnelles de Vénus, puis six fois de Mercure avant d’arriver à bon port, fin 2025.
Ces assistances sont indispensables pour écourter au maximum la durée des longs voyages interplanétaires des sondes. Suivant les cas elles permettent d’accélérer la vitesse de la sonde, dans d’autres cas de la ralentir (pour se mettre en orbite autour d’une planète il faut suffisamment ralentir pour être “capté” par l’attraction de la planète, sinon on continue tout droit !). De surcroit cette méthode peut également servir à effectuer des corrections de trajectoire.
L’animation ci-dessous vous montre la totalité du parcours (7 ans) de BepiColombo, de son lancement à son arrivée. La totalité de ce parcours représente un voyage de 9 milliards de kilomètres (ce qui explique la durée du voyage) alors qu’en ligne droite la distance Terre-Mercure n’est que de 92 millions de km ! Sauf qu’on ne peut pas y aller en ligne droite pour 2 raisons essentielles : la première est que la Terre et Mercure tournent toutes les deux autour du Soleil mais à des vitesses très différentes; la seconde est qu’il faut fortement “freiner” avant d’arriver vers Mercure, sinon on continue tout droit pour aller probablement s’écraser sur notre étoile !
Animation montrant le déroulement du transit de BepiColombo entre la Terre et Mercure.
Pour en savoir plus sur l’assistance gravitationnelle, cliquez sur ce lien.
Une fois en orbite autour de Mercure, BepiColombo larguera successivement deux sondes avec des orbites différentes : la sonde MPO aura une orbite elliptique, d’une durée de 2,3 heures autour de Mercure, avec un périastre de 480 km et un apoastre de 1.500 km. La sonde MMO aura une orbite plus elliptique encore, d’une durée de 9,3 heures, avec un périastre à 590 km et un apoastre de 11.640 km.
Le périastre est l’endroit de l’orbite d’une sonde où celle-ci est au plus près de la planète autour de laquelle elle tourne. À contrario, l’apoastre est le point de l’orbite où la sonde est au plus loin. Précisions sur ces mots.
Les modules MPO à gauche et MMO à droite | Orbites respectives des deux modules |
Les objectifs scientifiques de la mission BepiColombo sont énormes et portent sur les thèmes suivants :
- Formation et évolution de la planète
- déterminer comment Mercure s’est formée et exploiter ces données pour améliorer notre compréhension de la formation du Système solaire. Notre Système solaire s’est formé à partir d’un immense nuage composé de gaz d’origine cosmique, la nébuleuse solaire primitive. L’étude de la composition et de l’évolution des planètes peut contribuer à apporter des informations sur sa structure et sa composition.
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- déterminer comment Mercure a évolué depuis sa formation. Dans quelle mesure a-t-elle changé au cours des 4,6 milliards d’années qui se sont écoulées depuis ?
- quelle information peut-on tirer de Mercure concernant l’origine et l’évolution d’une planète proche de son étoile ?
- Structure du noyau et composition de la planète
- quelle est la structure interne de Mercure ? Quelle est la taille respective du noyau solide et du noyau liquide ? Confirmer la présence d’un noyau liquide.
- de quoi est composée Mercure ? Expliquer l’absence de traces de fer lors de toutes les analyses spectroscopiques alors qu’il est supposé être le constituant principal de la planète. Quelle quantité de fer contient la planète et pourquoi le noyau de celle-ci est-il encore partiellement liquide ?
- quelle est la taille du noyau ? Pour quelle raison la densité de Mercure est-elle aussi élevée ?
- Géologie de la surface et histoire des cratères
- existe-t-il des indices à la surface de Mercure indiquant que des processus géologiques sont en cours ? La planète est-elle géologiquement active comme la Terre ou est-elle inactive comme la planète Mars ? Existe-t-il encore une activité volcanique ?
- faire l’inventaire des cratères par type, distribution spatiale, et nombre. La sonde spatiale effectuera une cartographie des formations présentes en surface, en particulier des cratères, et étudiera les dépôts présents en surface.
- Orbite
- Mercure tourne à faible distance autour du Soleil en décrivant une orbite elliptique avec une excentricité élevée. De ce fait elle est l’un des corps célestes qui rencontrent les conditions les plus extrêmes : températures élevées, fort taux de radiation, bombardement par des particules ionisées. Comment sont formées des planètes aussi proches de leur étoile et comment évoluent-elles ?
- l’anomalie de l’avance du périhélie de Mercure (42,98 secondes d’arc par siècle) a été expliquée par la courbure de l’espace-temps près du Soleil. Comment peut-on utiliser la proximité du Soleil pour tester la théorie de la Relativité Générale d’Einstein ?
- Magnétosphère
- Mercure a un champ magnétique intrinsèque alors que Vénus ou Mars en sont dépourvues. Comment ce champ magnétique est-il généré et quelle est sa structure ?
- étudier les interactions du champ magnétique, de la magnétosphère et de l’exosphère avec le vent solaire. Ce vent constitué de particules chargées émises par le Soleil interagit normalement avec l’environnement des planètes internes en produisant des phénomènes comme les aurores polaires, les ceintures de radiation et les tempêtes de la magnétosphère. Est-ce que ces phénomènes se produisent sur Mercure ?
- Atmosphère
- Mercure a une atmosphère très ténue et changeante, l’exosphère, mais ne dispose d’aucune ionosphère. Comment l’exosphère s’est-elle formée et comment se reconstitue-t-elle ? Comment est-elle structurée et quels sont les processus qui la font évoluer ?
- Eau et glace
- Mercure dispose de dépôts de glace d’eau dans les zones de cratères des régions polaires qui sont situées en permanence à l’ombre. Est-ce que c’est de la glace d’eau pure ou est-elle mélangée avec d’autres matériaux ? Quels sont ces autres matériaux et quelle est l’origine de la glace ? Est-ce que certaines molécules d’eau sont piégées dans l’atmosphère ?
- Environnement cosmique
- la sonde spatiale doit étudier la poussière présente dans l’espace interplanétaire issue des comètes et des astéroïdes pour améliorer notre connaissance de la région interne du Système solaire et pour évaluer avec plus de précision un certain nombre de processus se produisant dans le Soleil et à proximité de celui-ci comme les ondes de choc solaires qui ne peuvent pas être détectées depuis la Terre.
RENDEZ-VOUS EN DÉCEMBRE 2025 !